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Pénibilité au travail et incidence sur la retraite : la réforme de 2023 a-t-elle permis des avancées ?

À la Une
3 juin 2025

Pénibilité au travail et incidence sur la retraite : la réforme de 2023 a-t-elle permis des avancées ?

La pénibilité au travail touche une part importante de la population active. Une étude de la Dares1 publiée en mai 2024 indique que plus de la moitié des salariés sont exposés à au moins six facteurs de pénibilité physique ressentie. Ces conditions peuvent peser lourdement sur la santé, la durée des carrières, et donc sur les droits à la retraite. Pour répondre à cette réalité, la réforme des retraites de 2023 a cherché à adapter les dispositifs existants. Qui est concerné ? Quels sont les critères ? Et quelles sont les réelles avancées ?


1. Évolution des critères de pénibilité et des contreparties

1.1 Rappel historique

En 2010, la loi Woerth 2, relative à la réforme des retraites, introduit la faculté d’anticiper son départ à la retraite au motif d’une incapacité permanente liée à une maladie professionnelle.

Toutefois c’est en 2015 que la notion de pénibilité avec des critères précis de pénibilité (sans nécessité d’une incapacité permanente) entre en vigueur avec un impact direct sur la retraite.
À partir de là, les critères évoluent dans le temps mais les bases sont désormais posées.

1.2 Évolution du compte pénibilité au C2P

L’année 2014 marque donc la naissance du compte pénibilité qui prend effet dès 2015.
Il permet aux salariés qui occupent des emplois particulièrement exposés à des facteurs de risque (comme le travail de nuit, les travaux en milieu bruyant, les vibrations, l’exposition à des substances dangereuses, la manutention manuelle de charges lourdes, etc.) de cumuler des points pouvant être utilisés pour financer une réduction de la durée de travail ou pour partir plus tôt à la retraite. Ce compte est géré tout au long de la carrière professionnelle et donne droit à une retraite anticipée dans certaines conditions.

En 2017, suite à la loi du travail de 2016, le Compte Pénibilité est remplacé par le Compte Professionnel de Prévention, dit « C2P », allégeant le nombre de facteurs déterminants de 10 à 6.

Ce changement vise à simplifier le dispositif et à le rendre plus facile à appliquer pour les employeurs.

Les 4 facteurs supprimés du C2P sont considérés comme trop complexes à évaluer dans le cadre d’un suivi automatisé.

Pour autant, même s’ils ne sont plus pris en compte dans le C2P, ces 4 facteurs ne sont pas ignorés. Leur impact est désormais reconnu à travers un autre dispositif : le droit à la retraite anticipée pour pénibilité.

1.3 Quelles avantages en contrepartie de la pénibilité ?

Les salariés exposés à des facteurs de pénibilité peuvent cumuler des points sur leur Compte professionnel de prévention (C2P). Ces points peuvent être utilisés de trois manières :

  • Pour financer une formation via le Compte personnel de formation (CPF),
  • Pour passer à temps partiel sans perte de revenu,
  • Pour partir plus tôt à la retraite, jusqu’à deux ans avant l’âge légal.

2. Nouveautés sur les retraites avec la Réforme de 2023

2.1 Élargissement du nombre d’assurés concernés

En assouplissant les critères permettant l’acquisition de points dans le C2P, la réforme permet à un plus grand nombre d’assurés d’acquérir des points dans leur compte C2P et pas conséquence de pouvoir prétendre à un départ anticipé à la retraite :

  • En effet, les seuils associés à certains facteurs de risque sont abaissés.
    Par exemple, le « travail de nuit » passe de 120 à 100 nuits par an.
  • De plus le compte professionnel de prévention, qui était limité à 100 points est désormais illimité.
    Prenons un exemple : un assuré exposé à 3 facteurs de pénibilité peut acquérir 12 points par an. S’il exerce cette activité pendant 10 ans, son C2P atteint 120 points.
    Il peut alors faire le choix d’en convertir jusqu’à 80 en trimestres de retraite. Dans ce cas, il peut, en fonction d’autres critères, anticiper de 2 ans son départ à la retraite.

2.2 Amélioration de l’information aux assurés

La loi prévoit également un renforcement de l’information aux assurés potentiellement concernés par la retraite anticipée pour pénibilité. Ainsi le législateur affiche la volonté que les assurés ne passent pas à côté d’un dispositif qui leur est favorable, à moins que ce ne soit un aveu de la complexité des dispositifs en place. En effet, 2 dispositifs coexistent et les terminologies créent la confusion.

À la suite de la loi Woerth de 2010, a été mis en place un dispositif de départ anticipé pour pénibilité qui nécessite que l’assuré soit reconnu en incapacité permanente suite à une maladie professionnelle. Ce dispositif permet de demander sa retraite dès l’âge de 60 ans.

En 2015, avec la création du compte de pénibilité, s’ouvre également la possibilité d’anticiper le départ à la retraite de 8 trimestres au maximum, en fonction du nombre de points acquis dans le compte de pénibilité et à la condition que l’assuré opte pour la conversion de ses points en trimestres de retraite.

2.3 Renforcement de l’anticipation du départ à la retraite

Alors que la date d’ouverture des droits à la retraite glisse progressivement à 64 ans, soit 2 ans de plus que l’âge légal avant réforme, l’âge de départ anticipé pour pénibilité n’a pas évolué et reste fixé à 60 ans.
Ainsi, pour les assurés nés à partir de 1968, l’anticipation du départ à la retraite pour pénibilité peut aller jusqu’à 4 ans, contre 2 ans avant la réforme.

3.1. Création d’un fonds de prévention

La réforme a instauré un fonds d’investissement pour la prévention de l’usure professionnelle, destiné à financer des actions dans les secteurs à forte pénibilité (comme le BTP ou les métiers du soin). Il soutient des mesures de prévention, d’adaptation de postes et d’accompagnement des fins de carrière.

3.2. Obligations des entreprises

Les entreprises restent juridiquement responsables de la prévention de la pénibilité. Elles doivent mettre en place des plans d’action, sous peine de sanctions. Même si les cotisations C2P ont été supprimées, les obligations de négociation et de gestion restent fortes.

Les conséquences sont multiples : coût des aménagements, baisse de productivité en cas de départs anticipés, nécessité d’adapter la gestion des ressources humaines.
Il devient crucial d’investir dans la reconversion, la réduction du temps de travail, ou encore la valorisation des seniors.


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  1. Salariés travaillant dans des établissements de 10 salariés ou plus : étude de la DARES ↩︎
  2. Loi Woerth ↩︎

Ressources :
Réforme des retraites : publication des décrets relatifs à la prévention de l’usure professionnelle
Compte Professionnel de Prévention C2P : les nouveautés 2023
La retraite pour incapacité permanente

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